Coiffure à la Cleóphile
À la page 227 de l’almanach Le Trésor nous trouvons une représentation de la coiffure “à la Cléophile,” un style gonflé, orné de bijoux, d’une bande de tissu blanche et de quatre plumes. Les bijoux ressemblent à un brin de perles, et le tissu est placé au-dessus des bijoux. Trônant sur tout cela les quatre larges et épaisses plumes--une bleue, une jaune, et deux rouges--se recourbent sur le haut de la tête. Nous pouvons imaginer l’emploi d’un câblage métallique sous les cheveux, pour soutenir cette imposante coiffure.
Ce style, “à la Cléophile” a probablement été inspiré par un personnage de théâtre français, en particulier, la Cléophile de la tragédie de Jean Racine, Alexandre le Grand. Cette pièce qui avait tant plu à Louis XIV avait été réalisée pour la première fois le 4 décembre 1665, par la troupe de Molière, au Théâtre du Palais Royal à Paris, et publiée en 1666. [1] La tragédie se concentre sur l'amour du grand conquérant Alexandre et la princesse indienne, Cléophile, qui représentait aux yeux des Français une beauté exotique. [2] Alexandre est représenté comme un héros pris dans les filets d’une tendre passion pour sa princesse et Racine offre le portrait d’une Cléophile attachée et admirative de l’envahisseur Alexandre; son seul bonheur se centre sur lui.
Toutefois, d'autres liens entre Cléophile et la mode apparaissent. Par exemple, la robe “à la Cléophile,” se présente dans un almanach de mode, publié lui aussi en 1780, la même année que Le Trésor. La robe “à la Cléophile” est décrite ainsi:
Comment devrait-on comprendre la présence de la coiffure “à la Cléophile” dans l'almanach de Marie-Antoinette? Le Trésor se concentre sur une variété de coiffures, et certaines d'entre elles, comme celle “à la Cléophile,” appartiennent aux personnages de théâtre. Cela n’est pas surprenant pour deux raisons principales. Tout d'abord, Marie-Antoinette aimait le théâtre. Elle a même commencé à participer dans des spectacles amateurs, à partir de 1780, dans un théâtre construit pour elle au Petit Trianon. [4] Ensuite, la fascination de la reine pour la mode et les cheveux est connue. Elle a fait du pouf son style fétiche et au fil du temps, son coiffeur Léonard Autié est devenu un de ses amis les plus proches et même un confident intime. [5] De plus, le personnage de Cléophile est désigné comme ayant été l'une des reines de la scène les plus appréciées sous l’ancien régime. Ainsi, les registres de la Comédie-Française nous montrent que la pièce a été reprise au cours du XVIIIe siècle. [6]
Même avant l’ouverture de la pièce de Racine à Paris, le public avait vu en Alexandre le Grand, le reflet du roi de France. [7] Les ambitions de guerrier de Louis XIV avaient rendu le parallèle entre ces grands hommes familier. Le tableau, La Famille de Darius aux pieds d’Alexandre, de Charles Le Brun, créé en 1661 et gravé en 1675, renforçait les liens entre Alexandre et Louis XIV. [8] Dans ce tableau, on voit qu’Alexandre montre de “la retenue et la clémence”, et le public aimait l’image touchante des Persanes implorant le conquérant. [9] Suivant cette peinture, Louis XIV a appelé Le Brun le plus grand artiste de France, et en 1682, la peinture a été installée au Salon de Mars à Versailles. [10] Elle demeure toujours au Musée National du Château de Versailles. [11] L’histoire d’Alexandre et de Cléophile, que ce soit par le théâtre, la peinture, ou d'autres modes de fiction, a continué à plaire à la famille royale et aux spectateurs parisiens.
Pamela Metani, Wellesley College Class of 2016
Ce style, “à la Cléophile” a probablement été inspiré par un personnage de théâtre français, en particulier, la Cléophile de la tragédie de Jean Racine, Alexandre le Grand. Cette pièce qui avait tant plu à Louis XIV avait été réalisée pour la première fois le 4 décembre 1665, par la troupe de Molière, au Théâtre du Palais Royal à Paris, et publiée en 1666. [1] La tragédie se concentre sur l'amour du grand conquérant Alexandre et la princesse indienne, Cléophile, qui représentait aux yeux des Français une beauté exotique. [2] Alexandre est représenté comme un héros pris dans les filets d’une tendre passion pour sa princesse et Racine offre le portrait d’une Cléophile attachée et admirative de l’envahisseur Alexandre; son seul bonheur se centre sur lui.
Toutefois, d'autres liens entre Cléophile et la mode apparaissent. Par exemple, la robe “à la Cléophile,” se présente dans un almanach de mode, publié lui aussi en 1780, la même année que Le Trésor. La robe “à la Cléophile” est décrite ainsi:
Une Polonaise, remarquable par sa manière d'être retroussée avec des olives et des glandes, de façon que les deux nervures de la taille agrafent les retroussis. Cette manière de retrousser procure une forme plus large à la draperie, et semble lui prêter de nouvelles grâces: c'est ce que n'ont pas manqué d'apercevoir les Elégantes de la Capitale. [3]Cette citation nous montre que les femmes de la haute société française utilisaient la robe “à la Cléophile” comme source d'inspiration pour leurs vêtements, aussi bien que pour leurs cheveux. Il est probable que la Coiffure du même nom a joué le même rôle, et il s’agissait d'inspirer un style complet de la tête aux pieds.
Comment devrait-on comprendre la présence de la coiffure “à la Cléophile” dans l'almanach de Marie-Antoinette? Le Trésor se concentre sur une variété de coiffures, et certaines d'entre elles, comme celle “à la Cléophile,” appartiennent aux personnages de théâtre. Cela n’est pas surprenant pour deux raisons principales. Tout d'abord, Marie-Antoinette aimait le théâtre. Elle a même commencé à participer dans des spectacles amateurs, à partir de 1780, dans un théâtre construit pour elle au Petit Trianon. [4] Ensuite, la fascination de la reine pour la mode et les cheveux est connue. Elle a fait du pouf son style fétiche et au fil du temps, son coiffeur Léonard Autié est devenu un de ses amis les plus proches et même un confident intime. [5] De plus, le personnage de Cléophile est désigné comme ayant été l'une des reines de la scène les plus appréciées sous l’ancien régime. Ainsi, les registres de la Comédie-Française nous montrent que la pièce a été reprise au cours du XVIIIe siècle. [6]
Même avant l’ouverture de la pièce de Racine à Paris, le public avait vu en Alexandre le Grand, le reflet du roi de France. [7] Les ambitions de guerrier de Louis XIV avaient rendu le parallèle entre ces grands hommes familier. Le tableau, La Famille de Darius aux pieds d’Alexandre, de Charles Le Brun, créé en 1661 et gravé en 1675, renforçait les liens entre Alexandre et Louis XIV. [8] Dans ce tableau, on voit qu’Alexandre montre de “la retenue et la clémence”, et le public aimait l’image touchante des Persanes implorant le conquérant. [9] Suivant cette peinture, Louis XIV a appelé Le Brun le plus grand artiste de France, et en 1682, la peinture a été installée au Salon de Mars à Versailles. [10] Elle demeure toujours au Musée National du Château de Versailles. [11] L’histoire d’Alexandre et de Cléophile, que ce soit par le théâtre, la peinture, ou d'autres modes de fiction, a continué à plaire à la famille royale et aux spectateurs parisiens.
Pamela Metani, Wellesley College Class of 2016
On page 227 of Marie-Antoinette’s almanach, Le Trésor, we find an illustration of the hairstyle ‘à la Cléophile’. This hairstyle is highly inflated pouf, covered in jewels, a white band made of cloth, and four feathers. The strand of jewels appears to be one of pearls, and the cloth is placed above these pearls. Four feathers crown this hairstyle, one is blue, one is yellow, and two of the feathers are red. We can also infer that underneath the hair itself lies some metal wiring in order to structure the hair.
The hairstyle ‘à la Cléophile’ was most likely inspired by a character in seventeenth-century French theater: Cléophile in Jean Racine’s play, Alexander the Great. This second of Racine’s tragedies was well liked by Louis XIV when it was first performed on December 4, 1665, in the Royal Theater of Paris, by Molière’s theatrical troupe. The play was published in 1666. [1] This tragedy focuses on the love of Alexander the Great and an Indian princess, Cléophile. It is very likely that Cléophile’s appeal in this period was linked to her so-called exoticness. [2] Indeed, Racine describes Alexander as having been infatuated by the Oriental queen Cléophile. The public sees that she is also in love with Alexander, her happiness stemming solely from the love the great conqueror shows her.
In addition to the hairstyle, there exist other mentions of Cléophile in a fashion setting. One such example is the dress ‘à la Cléophile’, which is presented in a fashion almanac of 1780, the same year in which Marie Antoinette’s almanac was published. The dress ‘à la Cléophile’ is described in the following way:
How should one interpret the presence of this hairstyle in Marie-Antoinette’s almanac? Le Trésor features different hairstyles, many of which belong to theatrical characters such as Cléophile. The inclusion of these theatrically-inspired hairstyles is not surprising, for to two main reasons. First, Marie-Antoinette loved the theater. She even began to participate in amateur plays in 1780, following the construction of her own theater on the premises of Versailles. [4] Secondly, the queen’s fascination with hairstyles is well-known. She pioneered the ‘pouf’ and spent so much time exploring new hairstyles with her coiffeur, Léonard Autié, that he eventually became one of her main confidantes. [5]
Cléophile is described as having been a queen of the stage in seventeenth-century France. Resources from the Comédie-Française show us that Cléophile maintained her presence on the French stage into the eighteenth century and beyond. [6] Furthermore, Alexander the Great served as model for, and a reflection of great kingship, especially for Louis XIV. [7] This association existed prior to the play’s first showing. The painting, The Family of Darius at Alexander’s Feet, by Charles Le Brun, created in 1661 and engraved in 1675, reinforced this association. [8] The painting depicts Alexander displaying a “singular example of restraint and clemency”, and as Persian royals come to beg mercy from their conqueror. [9] Following the creation of this painting, Louis XIV referred to Le Brun as the greatest artist in France, and in 1682, the painting was installed in Versailles’ Salon de Mars. [10] The painting is still featured in Versailles’ museum. [11] The story of Alexander and his galantry, whether it be through theater, painting, or fiction, continued to please both the royal family and Parisian spectators.
The hairstyle ‘à la Cléophile’ was most likely inspired by a character in seventeenth-century French theater: Cléophile in Jean Racine’s play, Alexander the Great. This second of Racine’s tragedies was well liked by Louis XIV when it was first performed on December 4, 1665, in the Royal Theater of Paris, by Molière’s theatrical troupe. The play was published in 1666. [1] This tragedy focuses on the love of Alexander the Great and an Indian princess, Cléophile. It is very likely that Cléophile’s appeal in this period was linked to her so-called exoticness. [2] Indeed, Racine describes Alexander as having been infatuated by the Oriental queen Cléophile. The public sees that she is also in love with Alexander, her happiness stemming solely from the love the great conqueror shows her.
In addition to the hairstyle, there exist other mentions of Cléophile in a fashion setting. One such example is the dress ‘à la Cléophile’, which is presented in a fashion almanac of 1780, the same year in which Marie Antoinette’s almanac was published. The dress ‘à la Cléophile’ is described in the following way:
A Polonaise, noteworthy for its manner of being pulled up with beads and tassels, in the method that the two seams of the waist fasten the places where it is pulled up. This manner of pulling up gives a very wide form to the drapery, and seems to lend it new graces: this is what the Elegant Women of the Capital did not fail to notice...[3]This quote shows us that the design of the dress ‘à la Cléophile’ inspired the fashion choices of upper-class French women. It is probable that the hairstyle ‘à la Cléophile’ would have served the same role, in terms of inspiring new trends.
How should one interpret the presence of this hairstyle in Marie-Antoinette’s almanac? Le Trésor features different hairstyles, many of which belong to theatrical characters such as Cléophile. The inclusion of these theatrically-inspired hairstyles is not surprising, for to two main reasons. First, Marie-Antoinette loved the theater. She even began to participate in amateur plays in 1780, following the construction of her own theater on the premises of Versailles. [4] Secondly, the queen’s fascination with hairstyles is well-known. She pioneered the ‘pouf’ and spent so much time exploring new hairstyles with her coiffeur, Léonard Autié, that he eventually became one of her main confidantes. [5]
Cléophile is described as having been a queen of the stage in seventeenth-century France. Resources from the Comédie-Française show us that Cléophile maintained her presence on the French stage into the eighteenth century and beyond. [6] Furthermore, Alexander the Great served as model for, and a reflection of great kingship, especially for Louis XIV. [7] This association existed prior to the play’s first showing. The painting, The Family of Darius at Alexander’s Feet, by Charles Le Brun, created in 1661 and engraved in 1675, reinforced this association. [8] The painting depicts Alexander displaying a “singular example of restraint and clemency”, and as Persian royals come to beg mercy from their conqueror. [9] Following the creation of this painting, Louis XIV referred to Le Brun as the greatest artist in France, and in 1682, the painting was installed in Versailles’ Salon de Mars. [10] The painting is still featured in Versailles’ museum. [11] The story of Alexander and his galantry, whether it be through theater, painting, or fiction, continued to please both the royal family and Parisian spectators.
Renvois
Personnages de théâtrePersonnages d’histoire
Orientalisme
Flatterie royale
Iconographie royaleGalanterie
Réferences / References
Chateau de Versailles, The Queen's Theater 2016.http://en.chateauversailles.fr/discover-the-estate/le-domaine-de-marie-antoinette/le-petit- trianon/the-queens-theatre
Comédie Française. La Grange: Alexandre le Grand. 2016.
http://www.comedie-francaise.fr/la-grange-recherche-avancee-resultats.php?id=555&p=2&critere=Titre:%20alexandre%20le%20grand;
Encyclopaedia Britannica. Jean Racine; French Dramatist. 2016.
http://www.britannica.com/biography/Jean-Racine
Galerie des Modes. Robe a la Cléophile. March 8, 2013.
http://mimic-of-modes.blogspot.com/2013/03/galerie-des-modes-30e-cahier-6e-figure.html
Huffingtonpost. Marie Antoinette's Craziest, Most Epic Hairstyles. October 16, 2013.
http://www.huffingtonpost.com/will-bashor/marie-antoinettes-crazies_b_4109620.html
Irish Shield and Monthly Milesian, The. Volume I. Caleb Bartlett: New York. 1829.
https://books.google.com/books?id=2TQNAAAAYAAJ&pg=PA182&lpg=PA182&dq=cleophile +racine&source=bl&ots=zecDZMJN_R&sig=ib_wV_ijRCYAgXyl96QVWoG79mI&hl=en&sa= X&ved=0ahUKEwjzt5_ngZvLAhXLrB4KHaYWCtMQ6AEIJjAC#v=onepage&q=cleophile&f=false
L’histoire par l’image. Alexandre dans la tente de Darius. 2016.
http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=1281&d=1&a=929
Macedonia Documents. Alexander III in Racine’s Dramaturgy. February 14, 2012.
http://documents-macedon.blogspot.ca/2012/02/alexander-great-in-racines-dramaturgy.html
Oxford Journals. Le Brun’s The Tent of Darius, Before and After. 2016.
http://fsb.oxfordjournals.org/content/33/123/21.extract
Princeton University Library. La Famille de Darius aux pieds d’Alexandre. 2015.
http://rbsc.princeton.edu/versailles/item/924