Des Coiffures pour l'histoire: un descriptif des gravures dans l’almanach de Marie-Antoinette, Le Trésor des Graces

Coiffure à la Sémiramis

La « Coiffure à la Sémiramis » est la première des onze images de coiffures qui se trouvent dans l’almanach. Une gravure colorée à la main, l’image dépeint une femme à l’air aristocratique, un regard coquet sur son visage. Elle est vêtue d’une robe verte dont le col est en dentelle et elle porte quelques bijoux. Pourtant, c’est sa coiffure élaborée qui attire l’attention : tous ses cheveux sont ramassés dans un pouf avec trois boucles sur le côté, à part deux longues boucles qui restent posées sur ses épaules. La hauteur de sa coiffure est augmentée par cinq plumes : deux jaunes, une bleue, une rose, et une verte. Le pouf est aussi décoré par des fleurs, de la verdure, des perles et ce qui pourrait être deux épis de blé.

Sémiramis était une reine légendaire de Syrie et la fondatrice de Babylon. L’auteur grec Diodore de Sicile la décrit dans son œuvre Histoire Universelle, traduit en français par l’abbé Jean Terrasson au XVIIIe siècle. La fille orpheline d’une déesse, elle était nourrie par les colombes. Un serviteur du roi l’a découverte et l’a adoptée. Grâce à sa beauté et à ses atouts nonpareils, elle est devenue l’épouse d’un général militaire, Oness. Ninus, le roi de Syrie, l’a rencontrée pendant une bataille où elle aidait son mari et il est tombé amoureux d’elle. Après le suicide d’Oness sous la pression du roi, Ninus s’est marié avec Sémiramis, qui est ainsi devenue la reine de Syrie. Elle a régné après la mort de Ninus.

L’histoire de Sémiramis a inspiré une tragédie de Voltaire. Publiée en 1749, cette pièce assez populaire a été jouée à la Comédie-Française 263 fois entre sa première représentation en 1748 et 1840. La tragédie est jouée 162 fois avant la Révolution y compris régulièrement entre 1770 et 1778, la décénie de la publication de l’almanach (Voir http://cfregisters.org/en/the-data/faceted-browser ). La mise en scène de cette pièce est vraiment luxueuse, comme le sont les costumes. La légende de la reine Sémiramis a connu une grande popularité au cours de l’Ancien Régime et il y a eu plusieurs autres spectacles, tels que des opéras et tragédies lyriques basés sur son histoire. Il est important de noter que, à part quelques éléments exotiques et orientaux, comme par exemple les chapeaux, les costumes de la pièce sont pour la plupart occidentaux. Les mises en scènes utilisent l’architecture classique, comme cela était typique en Europe pour les mises en scènes de cette période.

Sémiramis n’est pas la seule reine de Syrie qui a captivé l’imagination française. Cléopâtre, une autre reine puissante qui a régné après la mort de son mari le roi, est le personnage principal de Rodogune, une tragédie de Pierre Corneille. Il n’est pas surprenant qu’une coiffure portant le nom de Sémiramis figure dans Le Trésor des Grâces. Marie-Antoinette, qui a cultivé l’image d’une femme à la mode, et les autres courtisanes qui utilisaient des almanachs similaires, aimaient porter des coiffures inspirées par les grands évènements théâtrals récents. Comme avec les spectacles inspirés par Sémiramis, il y a seulement quelques références à l’histoire sur laquelle la coiffure est basée : il se peut que les fleurs et la verdure fassent référence aux jardins fameux de Babylon, ou que le blé signale l’importance des colombes dans la légende. Néanmoins les éléments de la coiffure – les plumes (peut-être plus grandes que d’habitude), les perles, et les fleurs – sont utilisés par les autres coiffures dans l’almanach; malgré son nom l’image reste occidentale.
 

Bhargavi Ramanathan, Wellesley College Class of 2016
The “Coiffure à la Sémiramis” is the first of the eleven engravings found in the almanac. An engraving colored by hand, it depicts an aristocratic woman who wears a flirtatious look on her face. She is dressed in a green gown, whose collar is made of lace. She also wears long earrings. Despite these jewels, it is her elaborate hairstyle that attracts the viewer’s attention: all her hair is gathered into one large pouf with three curls on the side, except for two long curls that rest on her shoulders. The height of her hairstyle is increased by five feathers: two yellow, one blue, one pink, and one green. The pouf is also decorated with flowers, greenery, beads and what might be two ears of wheat.

Sémiramis was a legendary queen of Syria and the founder of Babylon. The Greek author Diodorus of Sicily describes her in his work Bibliotheca historica, which was translated into French by Father Jean Terrasson in the eighteenth century. The orphaned daughter of a goddess, she was fed by doves. A servant of the king found and adopted her. Thanks to her beauty and her unparalleled attributes, she became the wife of a military general, Oness. Ninus, the king of Syria, met her during a battle where she was helping her husband and fell in love with her. After Oness’s suicide under the pressure of the king, Ninus married Sémiramis, who thus became queen of Syria. She ruled after Ninus’s death.

The history of Sémiramis inspired a tragedy by Voltaire. Published in 1749, this popular play was performed at the Comédie-Française 238 times between its publication and 1840 and 162 times before the French Revolution. It played regularly in the decade of the 1770s when the almanac was published. The set of the play was truly luxurious, as were the costumes. The tragedy was also arranged as a tragédie-lyrique by Philippe Desriaux. In addition, there were other theatrical spectacles, such as operas, based on the legend of this queen. It is important to note that, beyond a few elements, such as the hats that were meant to underscore her exotic or “oriental” origins, the costumes for Sémiramis were largely occidental. The sets used classical architecture, as was typical in Europe during this period.

Sémiramis is not the only queen of Syria to have captivated the French imagination. Cléopâtre, another powerful queen who ruled after the death of her husband, the king, is the main character of Rodogune, Princesse des Parthes a tragedy written by Corneille in 1647.  It is not surprising that a hairstyle bearing the name of Sémiramis is in Le Trésor des Grâces. Marie-Antoinette, who cultivated her image as a fashionable woman and the other women of the highest echelons of French society who used similar almanacs, enjoyed wearing hairstyles inspired by recent theatrical events. As with the plays inspired by Sémiramis, there are only a few references to the history on which the hairstyle is based: it may be that the flowers and the greenery refer to the famous gardens of Babylon, or that the wheat signals the importance of doves in the legend. Nevertheless, the elements of the hairstyle – the feathers, the flowers, the beads – are used by the other hairstyles in the almanac; in spite of its name, this hairstyle remains very much occidental.
 

Autres ressources / Other resources:



Traduction d’Histoire Universelle : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k82233m
"The Library of History by Diodorus of Sicily, Book II." LacusCurtius • Diodorus Siculus. Web. 14 May 2016. http://penelope.uchicago.edu/Thayer/E/Roman/Texts/Diodorus_Siculus/2A*.html.
La Tragédie de Sémiramis, par Voltaire : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5783896g
Joannidès, A. La  Comédie-française de 1680 à 1900. Print.
Mise en scène de la pièce de Voltaire : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53118054d
Costume de Ninus (pièce de Voltaire) : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90067366
Sémiramis, Tragédie-lyrique en trois actes : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k48388s
Mise en scène d’une autre adaptation de l’histoire de Sémiramis : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53118048s
Costumes de quelques autres adaptations: http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8454618f, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8454622b

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