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Historiographics

Un champ d'exploration pour des narrations alternatives à dominante visuelle

Cécile Armand, Author
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Mutimedia History - Saison 4/Episode 1 : Une histoire sensible, immédiate et immersive

Les artistes proposent souvent une histoire sensible voire immersive, proche de l'histoire sensible, immédiate et vivante que cherchent certains historiens. Le récit renonce ici à la pure description et l'illusoire prétention à la neutralité. Il ne dissimule plus l'inévitable subjectivité du narrateur et ne craint pas d'enrichir le récit de son imagination et ses expériences personnelles.

Le récit affectif aussi, pour ne pas succomber à la croyance en une une transparence du passé historique, qui serait immédiatement donné à l'historien - l'illusion connue mais souvent contournée d'une connaissance immanente du passé. Le passé est toujours médiatisé par l'expérience et les représentations des acteurs sociaux de l'époque, qui nous sont devenus lointains voire étrangers. Comment les événements, dont les structures et conditions de perception ont changé, peuvent-ils être connus, formalisés et transmis, sinon par l'imagination ?

L’œuvre de Cardiff, Miller, Alterbahnof Video Walf (2012) présenté à la Documenta de Cassel en 2013 tente d'apporter une réponse : elle propose d'utiliser les outils de visualisation, de réalité augmentée ou de localisation (applications sur smartphone en l'occurrence) pour construire des récits historiques, pour historiciser les lieux urbains - précisément, la gare de Cassel. La gare devient un lieu transhistorique, car elle est "affectivée" par le mouvement de (l'historien ?) promeneur. Cardiff propose un récit historique novateur qui lie affectivité et mouvement : l'historien-promeneur est (é)mu au sens fort, étymologique du mot. Ce récit d'ego-histoire en apparence, tissé d'émotions, d'expériences, de souvenirs, est aussi truffé d'indications documentaires et historiques sur lieux ou des objets, qui guident la navigation. C'est une histoire "participative", finalement : écrite ou parcourue plutôt par le spectateur, le promeneur, le visiteur, le flâneur, dont le mouvement seul trace le récit. Même si ce mouvement n'est pas entièrement libre : la visite est en partie guidée, comme par un « audio-guide » amélioré.

L'application mobile contient des voix, des sons des images, des vidéos pré enregistrés. L'écran fait apparaître des personnages ou objets qui n'existent plus : il juxtapose différentes couches temporelles et différents niveaux de réalité ou de présence, pour les rendre coprésents justement - démarche anachronique ou anachrotopique sur laquelle nous serons amenés à revenir. L'écran a ainsi plusieurs fonctions :
  • film amateur (impression qu'a le spectateur en mouvement de filmer la scène, comme un touriste ou un promeneur),
  • application de réalité augmentée (ajout d'informations visuelles et sonores, de documents d'archives)
  • guide d'alignement : l'application demande au spectateur de s'aligner sur le passé et sur le travail de l'artiste.
Le récit mobile autorise une histoire augmentée et immersive, qui entrelace les couches temporelles et les niveaux de réalité, où le promeneur peine à distinguer les souvenirs personnels de l'histoire universelle, la mémoire individuelle de l'histoire collective, le passé du présent, la fiction de la réalité - notamment par la confusion entre les sons présents perçus par le promeneur et les sons pré-enregistrés.

Cet exemple pose enfin la question de l'articulation entre image, texte et sons dans la construction du récit historique : dans le cas de la gare de Cassel le récit est surtout sonore. Mais comment réintégrer l'image pour la faire participer à l'affectivisation ? L'image compte au fond moins que l'écran, le medium, la promenade, qui permet de créer ce mouvement de va-et-vient. L'image isolée a surtout pour fonction de :
  • donner un cadre (framing), un contexte
  • conférer le sentiment d'un lieu hanté par le passé (à partir des archives notamment (comme cette réminiscence de la ballerine dansant au milieu de la gare) qui procure une impression vague, un effet de flou historique.
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